Les festivals qui battent leur plein en Tunisie, des côtes Nord jusqu'aux régions désertiques du Sud, tentent de renouer avec des pratiques artistiques locales et concilier tradition et culture pop.

Le festival de Carthage (banlieue de Tunis), moment fort de la saison estivale, a inauguré à la mi-juillet sa 43e édition avec un spectacle faisant la part belle à la tradition. "Voix de Tunisie" monté par Mourad Sakli, directeur du prestigieux Centre de la musique arabe et méditerranéenne, a fait défiler dans des tableaux colorés près de 200 artistes dans de somptueux costumes traditionnels. D'élégants tapis noués à la main de Kairouan (Centre), de kilim et mergoum aux motifs chatoyants du Sud, le décor planté dans l'amphithéâtre romain de Carthage se voulait une mosaïque du terroir.

Le spectacle revisitait des registres musicaux anciens, des contes de la geste populaire, expressions rurales et chants des îles, avec fantasia et rituel soufi des différentes confréries. Les affiches du festival, qui ont envahi les rues de Tunis, annonçaient aussi des variétés.

En plus des spectacles dédiés aux jeunes (Magic System et L5), les Tunisois pouvaient écouter entre autres le Français Dany Brillant, l'Irakien Kadhem Essaer, ou rire aux éclats avec l'humoriste marocain Gad Elmaleh.

Au nord, Tabarka a ouvert le bal par une rencontre inédite entre l'Américain Yusef Latif et les frères Belmondo (France), enchaînant avec le Colombien Yuri Buenaventura, avant de danser jusqu'au 20 août aux rythmes latino ou raï. Pour cette station balnéaire, le festival est une occasion de promouvoir le tourisme, occuper et divertir ses jeunes tentés par l'immigration.

Au centre de la Tunisie, dans l'amphithéâtre d'El Jem (250 km de Tunis), on a pu savourer la prestation de l'orchestre du bal de l'Opéra de Vienne. Hammamet, la station huppée du Nord-Est, célébrait cette année les arts de la scène, avec des pièces de théâtre à succès dont "Corps Otages" de Fadhel Jaïbi, une oeuvre un moment censurée et traitant de l'embrigadement des jeunes dans les courants extrémistes.

Chants tziganes, flamenco et musique pop sont également à l'affiche. En supplémment, chaque ville et village y va de sa fête pour célébrer un produit du terroir comme l'olivier, la vigne ou le poulpe. "Autant d'occasions de métissage et d'ouvertre d'horizon", affirme Raja Farhat, directeur du festival de Carthage.

Un temps délaissées, les fêtes maraboutiques ont été remises au goût du jour et attirent des milliers d'adeptes à Sidi Ali Hattab (près de Tunis) comme à Sidi Bou Ali, dans l'oasis de Nefta, à la lisière du désert. Percussions, transes, chants liturgiques et concours équestres rythment les "zerda" dans les mausolées, où le couscous est généreusement distribué.

D'autres rituels païens continuent à défier le temps comme à Sousse (Centre-Est), où le festival d'Aoussou célèbre le Dieu de la Mer par un grand carnaval le 25 juillet. Air du temps oblige, la Tunisie est devenue une Mecque de DJ comme le Français David Guetta ou l'Américain Sandy Revera, au bonheur d'un public fortuné. Une diversité voulue à l'image de la Tunisie, un pays arabo-musulman cherchant à "concilier modernité et tradition", comme au temps des troubadours nomades d'il y a des siècles, ajoute M. Farhat.

source: rtlinfo.be