Le film iranien Nahid de Ida Panahandeh a remporté le Prix de l’Avenir (Ex-aequo avec le film MASAAN Réalisé par Neeraj GHAYWAN) dans la sélection « Un certain regard » de cette 68ème session du Festival de Cannes.

 

Etre femme ou être mère ?

Tel est le dilemme auquel devra faire face Nahid (Sareh Bayat), héroïne du premier long métrage de la réalisatrice iranienne Ida Panahandeh.

Nahid, une jeune femme divorcée, habite avec son jeune fils Réza Amir qu’elle essaye d’élever du mieux qu’elle peut. Elle travaille d’ailleurs dur pour subvenir à ses besoins et payer ses études.

Seulement Nahid va devoir affronter une loi injuste de son pays qui accorde le droit de garde au père en cas de divorce.

Pour avoir son fils auprès d’elle, Nahid a passé un marché avec son ex-mari : elle renonce à son indemnité de divorce mais en contre partie elle garde son fils avec elle. Immature, toxicomane et instable, le père accepte le marché, mais à condition qu’elle ne se remarie pas.

 

Un jour, Nahid fait la connaissance de Massoud, un jeune veuf dont elle tombe amoureuse et qui sera prêt à tout pour elle.

Que peut faire Nahid ? Si elle remarie, elle perd la garde de son fils. Mais comment laisser tomber son amoureux et s’oublier en tant que femme ?

Les deux amoureux trouvent une astuce : le mariage temporaire renouvelable. En effet, ce mariage n’est pas porté sur le livret de famille et donc pourra être caché à l’ex-mari et à toute la famille.

Commence pour Nahid une double vie, entre son fils et son mari, avec tout ce que cela comporte comme difficultés, mensonges, cachoteries…

Mais malgré toutes les précautions prises, le père va quand même apprendre le remariage de Nahid. Il va réagir violement et récupérera son fils. Quant à Nahid, elle est condamnée par tous : comment a-t-elle osé privilégier son remariage à son fils ? Comment en fait a-t-elle choisi d’être une épouse et une femme alors qu’elle aurait du se contenter de son rôle de mère ? Tous seront contre Nahid, tous, y compris sa propre famille et son fils.

Dans un premier temps, Nahid restera auprès de son mari qui l’encouragera à engager une procédure pour demander la garde de son fils puisque la loi le permet lorsque le père est délinquant, drogué ou atteint de troubles psychiatriques.

Mais Nahid ne pourra pas résister longtemps à l’éloignement de son fils et à la pression de sa famille. Elle finit par leur céder et refuser de renouveler son mariage temporaire. Mais cette fois ci elle est contrainte de retourner vivre dans la maison familiale et de supporter la loi des mâles de la famille.

A travers Nahid, Ida Panahandeh, donne un aperçue sur la vie quotidienne d’une femme iranienne qui se débat tous les jours dans une société où le mâle, qu’il soit père, mari, frère ou fils fait la loi. Elle explore avec subtilité la condition de la femme iranienne, qui même si elle fait des études, travaille, subvient aux besoins de fa famille, reste quand même soumise à des lois et des coutumes d’une autre époque.

 

Ida Panahandeh décrit aussi les déchirements de Nahid qui ne sait plus si elle doit vivre sa vie de femme, d’épouse et d’amoureuse ou se résigner à n’être qu’une mère. Pourquoi le devrait-elle d’ailleurs ? Juste pour obéir à une société régit par des règles rétrogrades et hypocrites ? Pourquoi n’a-t-elle pas le droit de vivre pleinement son amour ?

Nahid n’a pourtant pas négligé son fils. Elle est une bonne mère, courageuse, responsable… N’est ce pas injuste qu’on lui demande de se sacrifier alors qu’elle a montré qu’elle était capable de s’occuper de son fils tout en étant femme ? Pourquoi est-ce que cette société iranienne privilégie un être comme le mari, violent, irresponsable, incapable de s’occuper de son fils, juste parce qu’il est un homme ?

Nahid ressent cette injustice profonde. Mais elle ne baisse pas les bras. Au contraire, tout à la fin du film, elle se prépare à mener une nouvelle bataille : bien qu’ils soient séparés, elle demande à Massoud d’engager pour elle une nouvelle procédure en justice, rien que pour obliger la justice iranienne à se prononcer : entre une mère responsable, ayant un emploi, ayant fait ses preuves, et un père complètement irresponsable, ne sachant même pas s’occuper de sa propre personne, à qui la justice iranienne confiera-t-elle la garde de l’enfant ?

Quelle sera la décision de la justice ? La question est posée.


Neila Driss