Les récentes émeutes conduites par des extrémistes religieux mêlés à des voyous casseurs et pilleurs révoltent les professionnels du tourisme. Quelque 200 professionnels ont crié hier à partir de 10 heures, à l’Avenue Habib Bourguiba leur ras-le-bol et détresse contre ces « éléments égarés » et ces anarchistes qui ont donné un coup de poignard dans le dos de l’industrie touristique tunisienne. Organisée à l’Initiative de la Fédération Tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) et de la Fédération Tunisienne des Agences de Voyages (FTAV), la marche pacifique a été également marquée par la participation de plusieurs hôteliers, agents de voyage, des loueurs de voitures, des autocaristes, des guides, des restaurateurs, des artisans et des employés…. Réunis devant le siège du ministère du Tourisme à l’Avenue Mohamed V, les manifestants se sont dirigés vers l’Avenue Habib Bourguiba . Sous un soleil de plomb, ils ont réclamé une réponse ferme des autorités aux violences du début de la semaine qui ont conduit à l’instauration d’un couvre feu nocturne de mardi à vendredi. «Le tourisme est un pilier de l’économie nationale », «Arrêtez le bluff, osez la réalité», « Touche pas au pain de nos enfants », « 400.000 emplois sont menacés », « le tourisme est un secteur sinistré», « Le peuple veut l’application de la loi » peut-on notamment lire sur les banderoles blanches.
A bout de patience, les manifestants ont affirmé que les violences ont déjà eu un impact négatif sur la saison. « La saison touristique est totalement compromise. Personnellement j’ai enregistré un taux d’annulation est de 80% car les tour-opérateurs ne badinent pas avec la sécurité. Nous ne voulons plus voir ces images et ces scènes de guérilla qui rappellent Kaboul ou Qandahar », maugrée Abdelhafid Dami, voyagiste, depuis 1969. Et d’ajouter : « l’actuel ministre du Tourisme n’a rien fait. Le gouvernement est désormais obligé d’utiliser la violence légitime. Il faut sauver l’année 2014».
Jeune voyagiste, Riadh Zaâtour appelle, de son côté, le gouvernement à renoncer à son incurie face aux agissements des salafistes et des hors la loi de tout bord. « Nous en avons assez de payer les pots cassés. Nous ne demandons que l’application de la loi sur toute personne qui la défie. Le tourisme c'est le gagne-pain de 2 millions de tunisiens », précise-t-il indiquant que les récentes violences ont eu lieu à l’heure où les professionnels se préparaient à récolter les fruits de leurs investissements engagés depuis le début de l’année.
Le président de la FTAV, Mohamed-Ali Toumi, a, quant à lui, révélé que « des annulations et surtout un tassement net des réservations » a été constaté depuis l’instauration du couvre feu mardi.
Faisant état d’un taux d’annulation situé entre 5 et 8%, l’hôtelier Mourad M’henni estime, lui aussi, que « la saison risque d’être compromise». Il appelle également le gouvernement à prêter une oreille attentive aux professionnels lors d’une réunion de crise qui doit réunir tous les acteurs du secteur autour d’une même table. « Nous comprenons les problèmes dans lesquels se débat le gouvernement, mais il faut sauver l’industrie touristique », plaide-t-il.
Un cortège de véhicules et bus touristiques s’est déplacé à la fin de la marche pacifique vers le siège de l’Assemblée nationale constituante (ANC) au Bardo pour faire entendre la voix des professionnels auprès des élus du Peuple.
Le tourisme, qui représente 7% du PIB tunisien et emploie directement 400.000 personnes, a connu une crise sans précédent en 2011, dans la foulée de la révolution qui a fait chuter Ben Ali. L'activité a donné des signes de reprise depuis le début de l'année 2012 avec un accroissement des entrées de 51,8% sur les quatre premiers mois.