Alors voilà , les résultats du groupe Air France/KLM sont tombés et ils sont catastrophiques, encore plus que ce que les analystes imaginaient. La perte de l’exercice retraité sur 12 mois, c’est-à -dire du 01 janvier au 31 décembre 2011 est de 809 millions d’euros, ce qui fait (si je sais toujours faire les divisions) 2,216 millions d’euros par jour ou encore 92.300 € par heure et 1.539 € par minute.
Et ce d’autant plus qu’elle est reflétée par la chute de la trésorerie qui a été de 1,213 milliards d’euros pendant la même période, soit encore de 2.308 € par minute ou encore 38 € par seconde...
Alors, bien entendu, les dirigeants accusent la terre entière de ces mauvais résultats. Le pétrole augmente et c’est bien vrai.
Mais il augmente pour tout le monde y compris les concurrents. Les nuages islandais causent de gros dégâts, mais ils le font encore plus pour les compagnies britanniques.
La situation politique des pays arabes n’a pas été favorable, loin s’en faut, mais les transporteurs du Golfe n’ont-ils pas été impactées de la même manière sinon plus ?
Au lieu de chercher des excuses dans les facteurs extérieurs, les dirigeants ne feraient-ils pas mieux de regarder à l’intérieur même de l’entreprise ? J’ai relu les commentaires que ces mêmes dirigeants portent sur leurs résultats depuis quelques années et on constate toujours le même refrain.
D’abord les évènements extérieurs non maitrisables sont la cause essentielle des mauvais résultats et, de plus, nous allons faire baisser les coûts internes.
Il n’y a pas une présentation des résultats où ces commentaires ne soient pas mis en avant. Sauf que les baisses des coûts ont été pour l’essentiel supportés non pas par l’entreprise elle-même mais par les clients pour lesquels le produit a été constamment dégradé et par les agents de voyages auxquels les commissions ont été supprimées.
Sauf qu’il coûte plus cher à produire car les ratios de productivité du Groupe Air France/KLM sont très éloignés de ceux des concurrents à bas prix.
Et à force d’ignorer les agents de voyages, ceux-ci se sont tout naturellement tournés vers des solutions alternatives.
Si bien que les charges de l’entreprise continuent à croître alors que la recette nette diminue sous un formidable effet de ciseaux, constitué par l’offensive des transporteurs « low costs » et l’absence de politique active de distribution.
Le constat est dramatique et ne date pas de cet exercice. La dernière année profitable, hors retraitement exceptionnel dû à la revalorisation des actions d’Amadeus pour 1,030 milliard d’euros survenue en 2010, remonte à l’exercice 2007/2008.
Depuis ce moment, en dépit de toutes les annonces, rien n’a pu enrayer la chute et on ne voit pas ce qui pourrait redresser la situation sauf à faire de la chirurgie très lourde.
Certes British Airways a alors perdu de nombreuses places dans le classement des compagnies aériennes, mais cela a sauvé sa compagnie.
Force est de constater que les dirigeants d’Air France/KLM ont mené la politique inverse, et on voit ce que cela donne.
Depuis des années le produit se dégrade, la clientèle n’accepte plus de payer les prix qui permettraient d’équilibrer les comptes, les agents de voyages ne sont plus un atout et de plus le « hub » qui est le vrai pivot à la fois de la politique de la compagnie et de son opération est en train de produire des effets inverses.
Car pour alimenter le long courrier, Air France le fait subventionner par le court courrier qui a perdu 700 millions d’euros l’année dernière alors que ce réseau a été pendant longtemps la vache à lait de la compagnie.
Pour sortir de cette situation, il faudra faire des efforts considérables. Nombre d’analystes pensent même que la position d’Air France était meilleure en 1994, lorsqu’il a fallu que l’Etat injecte 22 milliards de francs, que maintenant. Or il n’est pas question que l’Etat puisse recapitaliser de nouveau son transporteur national.
Les règles communautaires s’y opposent comme les Hongrois ont pu le constater dernièrement. Il faudra donc s’en sortir tout seuls.
La question que l’on peut se poser est tout de même celle-ci : est-ce que les dirigeants qui ont mené l’entreprise dans cet état depuis longtemps, qui n’ont pas voulu affronter la réalité de la concurrence et qui « droits dans leurs bottes » ont poursuivi sans désemparer la même stratégie, sont les mieux qualifiés pour mener un redressement absolument nécessaire et terriblement difficile ?
Qui qu’ils soient, je leur souhaite bonne chance...
source: TourMag