Le président du parti islamiste tunisien Ennahdha, Rached Ghannouchi, a déclaré dans une interview au quotidien «Le Temps» qu’«il n’est pas nécessaire que la future Constitution tunisienne stipule que la Charia soit la source de la législation». Le leader du parti vainqueur des élections de l’Assemblée constituante a également jugé la reconduction de l’article I de l’ancienne Constitution suspendue qui définit la Tunisie comme étant un Etat musulman dont la religion est l'islam est suffisante à condition applique cet article. «Dans les pays du Moyen-Orient, les Constitutions stipulent que la Charia est la principale source de la législation ou l’une des sources de la législation. Au Yémen, la Constitution stipule que la Charia est l’unique source de la législation. Pourtant, des révolutions ont eu lieu dans ces pays », a-t-il déclaré.
M. Ghannouchi a, toutefois, précisé qu’«on peut, toutefois, ajouter un autre article qui interdit la promulgation de lois qui constituent une offense pour l’Islam », estimant que même le très laïc Bourguiba (premier président de la Tunisie indépendante, NDLR) a refusé de promulguer une loi qui ne respecte pas de façon claire les préceptes de l’Islam, à savoir la loi sur l’héritage.
Sur un autre plan, le président d’Ennahdha qui se dit très proche de l’AKP , le parti islamo-conservateur turc, a jugé qu’il n’est pas étrange que ces prédicateurs venus du Moyen-Orient rencontrent un grand succès d’autant plus que la mosquée Ezzeïtouna qui a formé jadis des élites religieuses tunisiennes éclairées et modérées a cessé de jouer ce rôle. «Après avoir été une forteresse reconnue en matière de sciences théologiques et de la civilisation islamique, la Tunisie est devenue depuis l’indépendance une terre aride dans ce domaine.. Depuis l’indépendance de la Tunisie, les pouvoirs en place ont adopté une politique de destruction systématique des instituions religieuses dans le pays, à commencer par Ezzeïtouna », a-t-il indiqué.
Concernant les salafistes, M. Ghannouchi a noté que cette mouvance n’est pas homogène. «Il faudrait dialoguer avec la frange modérée de la mouvance salafiste notamment en ce qui concerne leur refus de la démocratie. Ce rejet de la démocratie s’explique d’ailleurs par la faiblesse des connaissances religieuses des salafistes et leur lecture erronée des exigences de l’étape actuelle. Les salafistes djihadistes qui prônent la violence tombent, quant à eux, sous le coup de la loi », a-t-il martelé.