Olivier de NICOLA, nouvellement arrivé à la tête de Voyages Fram, va devoir relever un vrai challenge : remettre sur les rails une entreprise prestigieuse qui a subi des ans l’irréparable (?) outrage. Passionnant mais délicat dans une conjoncture toujours plus délétère. Il dévoile pour TourMaG.com sa feuille de route.
Olivier de NICOLA : "Pour être précis, mon arrivée a coïncidé avec la fin de grève.
Cette crise, une première chez Fram, m'a permis de prendre conscience des inquiétudes des collaborateurs quant à l'avenir de Fram en particulier et de notre profession en général.
Elle s'est cristallisée sur un différend concernant des primes mais c'était aussi une réaction basée sur l'amour "passionnée" que portent les équipes de Fram à leur entreprise et qui est mise à mal par le climat du business en 2011.
Aujourd'hui, je sais que toute l'entreprise est mobilisée pour préparer son "rebond".
TM.com - Plus sérieusement, quelles sont vos premières impressions sur la Maison Fram ?
O.deN. :"J'y ai trouvé un grand professionnalisme et un attachement très forts aux valeurs historiques de Fram. Mais aussi une envie de faire évoluer le modèle économique de l'entreprise.
J'ai aussi pu constater le paradoxe entre l'image "populaire et française" de Fram et la réalité d'une production bien plus ouverte et diversifiée."
TM.com - L'entreprise a fait état, pour la première fois en cette fin d'année, de difficultés financières. Mais dans le même temps elle verse des dividendes à ses actionnaires. Maladresse ou double discours ?
O.deN. :"Je dirais plutôt incompréhension et manque de connaissance. Fram a eu comme politique depuis toujours de laisser dans l'entreprise les bénéfices, ce qui était bien sûr très confortable.
Cette thésaurisation des résultats passés avait atteint un niveau anormal pour toute personne habituée à la finance d'entreprise.
Les actionnaires étaient parfaitement en droit de procéder à ce versement de dividendes et des audits ont été réalisés à ce moment-là afin de démontrer que cela ne mettait pas l'entreprise en péril.
En outre, personne n'a dit que l'ensemble des primes pour les collaborateurs avaient été octroyées à 100% dans le même temps malgré une perte financière importante liée au volcan.
En raison d'une année 2011 mauvaise, le management de Fram avait décidé de revenir à une application stricte des accords concernant les gratifications, ce qui a été très mal perçu.
Un amalgame a ensuite été fait entre versement de dividendes et fin des primes alors que les deux décisions ont été prises à des moments très différents.
Pour moi, cette page est aujourd'hui tournée et je suis heureux que Georges Colson ait choisi de traiter le sujet avant mon arrivée.
J'ai donc pu commencer mon mandat sur de nouvelles bases et je vais finaliser très vite avec nos élus la composante "prime variable" de nos nouveaux accords."
O.deN. :"Je termine ma face d'audit et de prise de connaissance de Fram en France. Ensuite j'écrirais ma feuille de route 2012 que je partagerai avec le directoire puis le Conseil de Surveillance.
Puis viendra ma conception de Fram 2015. En parallèle, les filiales étrangères devront aussi être accompagnées dans leur redéploiement.
Je n'ai pas la prétention de pouvoir faire des annonces aujourd'hui de quelque nature que ce soit, ce ne serait pas sérieux."
TM.com - On dit que votre feuille de route consistera à rendre l'entreprise plus rentable et séduisante, en un mot "bankable" pour une cession ultérieure. Cela suppose une restructuration et un PSE que les Syndicats disent avoir déjà commencé. Qu'en est-il ?
O.deN. :"Redressement et mutations sont les deux mots clés de mon mandat. Je n'ai pas comme objectif de rendre Fram ''vendable'' je cherche à rendre l'entreprise... rentable !
Si les actionnaires décident alors de faire évoluer l'actionnariat du Groupe, ce sera leur décision. Mais nous savons tous qu"'une entreprise rentable maîtrise mieux son destin !"
O.deN. :"Toute la profession sait que Fram avait une position très particulière sur le Maroc, la Tunisie et l'Egypte. Cela a contribué à la réussite de Fram pendant des années.
A court terme, ce n'est plus le cas. Mais cela ne doit pas nous conduire à attendre le retour de jours meilleurs sur ces destinations. Au contraire, cela doit nous aiguillonner et nous pousser à nous remettre en cause.
De plus, ce sont des phénomènes conjoncturels qui peuvent nous masquer des changements structurels du marché. A nous d'en tenir compte pour construire notre avenir."
TM.com - Selon vous, faut-il revoir le positionnement produit, tarifs et image de l'entreprise ?
O.deN. :"Mes chantiers sont multiples et l'adéquation client/produit sera forcément passée au crible. "
TM.com - Par exemple, allez-vous poursuivre et développer l'offre France ?
O.deN. :"Nous sommes très heureux de nos trois Framissima en France (Soustons, Argelès et Morzine) et j'ai eu très vite un coup de coeur pour le framissima Nature de Soustons. Mon seul regret, la rareté des terrains disponibles en bord de mer en France pour développer ce concept original."
TM.com - Au vu des difficultés du moment, de la baisse du pouvoir d'achat, envisagez-vous de faire une part plus importante aux moyen-courriers ?
O.deN. :"Nous vivons un double mouvement chez Fram : une réorientation de nos destinations moyens-courriers afin de maintenir nos volumes moyens-courriers et un développement du long-courrier afin de créer de nouvelles zones de croissance.
A ce titre, nous développons nos offres de produits labellisées avec le Framissima BangTao en Thaïlande et le Framissima Calodyne à lIe Maurice.
Nous devons continuer à faire comprendre aux agences de voyage que Fram c'est aussi de très beaux produits en long-courrier.
Par ailleurs, j'ai très vite remarqué dans notre production le Framissima Rubycon à Lanzarote et je suis heureux de découvrir la semaine prochaine au Maroc notre Framissiama Les Idryssides, qui vient de ré-ouvrir après une grosse rénovation.
Cet investissement hôtelier prouve la confiance que nous avons dans le futur du tourisme au Maroc.
Enfin, nous continuons d'innover dans le moyen-courier en terme de destination puisque nous lançons cette été l'ile de Kos avec le Framissima Capo di Kos.
TM.com - Quelle est votre marge de manoeuvre avec un président du Conseil de surveillance tel que Georges Colson ? Quelle sera la répartition des rôles de chacun ?
O.deN. :"Je ne suis pas sûr de bien comprendre votre question ou ce qu'elle pourrait sous-entendre.
Je préside un Directoire qui gouverne l'entreprise. Georges Colson préside le Conseil de Surveillance, au sein duquel j'ai trouvé l'écoute de grands professionnels.
J'agis donc dans le cadre d'une stratégie et d'un budget validé par mon Conseil de Surveillance avec toute latitude pour mener à bien ma mission."
O.deN. :"Le "Digital", comprenant notre site et les ventes des Pure-Players, représentent 15% de nos ventes en passagers."
TM.com - Comment se répartit le solde ?
O.deN. :"Notre réseau d'agences et le site Fram.fr se situent aux alentours de 25% de part de marché dans nos ventes.
Il est intéressant de savoir que nous traitons aujourd'hui notre réseau d'agences comme un réseau extérieur en le commissionnant, ce qui nous permet d'avoir une vision de sa qualité et de son efficacité dans un situation de marché normale."
TM.com - Envisagez-vous un développement de la part des ventes directes en multicanal ?
O.deN. :"Toutes les entreprises de tourisme sont concernées par la désintermédiation car cette tendance nous est dictée par le développement des technologies et son attractivité pour nos clients.
Nous devons donc être capable de renforcer notre vente directe, tout en soutenant nos partenaires distributeurs, qui eux construisent des voyages en direct.
Cela ne me gène pas, d'autant que j'ai eu la chance de diriger un grand réseaux il y a quelques années. Je comprends sans doute plus facilement les enjeux de chacun.
Autre considération de même nature : quelle sera notre position concernant le développement commercial plus direct de nos sociétés filiales ?
Je ne suis pas opposé à voir demain notre propre réceptif à l'étranger se faire référencer comme réceptif officiel de réseaux de distribution, par ailleurs client de Fram.
Je vois plutôt un monde futur ouvert sur tous ces sujets de vente et production directe. A chacun d'entre nous de veiller à concevoir des produits suffisamment attractifs pour conserver la confiance de ses clients."
TM.com - Souhaitez-vous étendre le maillage des agences Agence FRAM intégrées ou allez-vous plutôt vers une extension des Ambassades ?
O.deN. :"Nous étudierons toutes les opportunités de développement qui se présenteront mais ce n'est pas une priorité à court terme."
TM.com - Le périmètre du réseau actuel vous satisfait-il ou faudra-t-il fermer des agences intégrées pour réaliser des économies ?
O.deN. :"Il n'est pas prévu à ce jour de plan de fermeture d'agences. Si nous devions fermer une agence, ce serait dans le cadre de la gestion classique d'un réseau de vente."
O.deN. :"Je compte sur mes confrères pour me briefer sur les débats actuels du modèle production/distributeur !! De toute façon cette relation bipartite fera toujours l'objet de débats intenses.
J'aimerai bien plus entendre parler du changement de comportement du consommateur, de ces nouvelles attentes, de la place du mobile dans le modèle économique etc.
Quant à l'évolution du monde tour-operating, elle sera le même que celles des espèces sur notre terre, ceux qui évolueront survivront, les autres disparaîtront."
source: TourMag