En pilotant avec beaucoup de doigté l’énorme chantier de la mise à niveau de l’industrie tunisienne depuis 1995, année marqué par la signature d’un accord d’association avec l’Union européenne, Slim Tlatli a réussi à redresser l’embarcation qui était à la dérive. L’industrie tunisienne, immergée depuis 2008, dans le libre échange avec le marché communautaire, résiste à la concurrence. Mieux encore, elle tient tête à l’ogre chinois malgré un match inégal au niveau des coûts de production.
Nommé récemment ministre du Tourisme, le vétéran de la mise à niveau de l’industrie se trouve face au défi de transposer son modèle dans le tourisme.
A première vue, le tourisme tunisien semble avoir tiré son épingle du jeu en 2009, une « annus horribilis» marquée par une crise économique jamais vue depuis 1929 et à laquelle s’est venue greffée la pandémie de la grippe porcine. La Tunisie a reçu 6,721 millions de touristes (-1,9% par rapport à 2008) et engrangé des recettes de 3,350 milliards de dinars (en hausse de 1,6% sur un an en dinar). Mais comme rien ne vaut que par comparaison, le Maroc qui faisait figure de petit poucet dans le bassin méditerranéen il y a une dizaine d’années a reçu l’an passé 8,35 millions de touristes (+6%) et récolté 52,4 milliards de dirhams de recettes (-5,7%), soit 4, 6 milliards d’euros !
Une lecture plus profonde des chiffres du tourisme tunisien permet également de constater que la Tunisie n’a relativement tiré son épingle du jeu en 2009 que grâce aux touristes libyens et algériens, dont le nombre a atteint 2,7millions (1,8 millions de Libyens et 846 mille d’Algériens), soit 38% des entrées des non-résidents en Tunisie. Or, les professionnels du secteur savent pertinemment que nos voisins maghrébins ne font pratiquement pas tourner les hôtels, les compagnies aériennes et les agences de voyages puisqu’ils privilégient en grande partie la location de maisons comme mode d’hébergement et les déplacements personnels par voie terrestre comme mode de voyages. Les européens (3,9 millions) qui constituaient jusqu’à un temps récent le principal réservoir de touristes pour la Tunisie avec une proportion proche de 80% sont tombées à 59,8%. Autre ombre au tableau: les revenus par nuitée (57 euros) et par touriste (266 euros) enregistrés en Tunisie restent les plus faibles du bassin méditerranéen.
Pourquoi les touristes européens ont-ils fui la Tunisie? Les professionnels pointent, en premier lieu, du doigt une qualité des services qui ne cesse de se détériorer. Cet état de fait a été décrié par de nombreuses instances et médias occidentaux. C’est notamment le cas de la revue allemande Touristik Aktuelle. Cette revue, qui fait autorité chez les professionnels, a épinglé dans une étude publiée en mai 2007 la Tunisie pour la médiocre qualité de ses prestations. Les opérations de contrôle qualité menées depuis quelques années ne semblent pas avoir beaucoup contribué à tirer vers le haut la qualité des prestations. Même le programme de mise à niveau des établissements hôteliers (PMNH) ne suscite pas un engouement particulier auprès des hôteliers. Les projets approuvés par le Comité de Pilotage de ce programme n’a jusqu’ici concerné que 79 unités représentant 41 421 lits pour une capacité globale de 234000 lits répartis sur 840 hôtels.
Côté produits, la monoculture balnéaire et estivale plafonne. Selon une étude de l’agence de notation Fitch Rating, «la Tunisie s’est concentrée Depuis les années 60, exclusivement sur le développement des sites balnéaires. Cette stratégie de croissance a abouti à une surcapacité d’offre peu diversifiée qui rend les hôtels très dépendants des tours-opérateurs internationaux et favorise ainsi le bradage des prix ».
Contrairement à ses concurrents au sud de la Méditerranée, le pays n’ a entrepris la diversification de son produit que depuis quelques années.
Selon Mohamed Belaâjouza, président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), l’endettement excessif des hôteliers oblige également plusieurs d’entre eux à offrir des prestations médiocres et à céder facilement aux pressions des tour-opérateurs, ce qui renforce l’image d’une destination à bas prix. Conséquence : la Tunisie draine essentiellement une clientèle européenne appartenant à la classe moyenne, ce qui explique des recettes presque trois fois moins importantes que celles du royaume chérifien.
La destination pâtit également du protectionnisme excessif de son ciel, le boom des lits d’hôtels ne s’est pas accompagné d’une augmentation conséquente des sièges d’avions. Hormis Transavia, filiale d’Air France-KLM, le ciel tunisien reste hermétique aux compagnies low cost. La destination à moins de trois heures de vol des principales capitales européennes compte beaucoup moins de liaisons aériennes avec l’Europe que le Maroc, où opèrent près d’une cinquantaine de compagnies depuis l’entrée en vigueur, en 2006, de l’accord d’Open Sky, avec l’Union européenne.
Autre faiblesse montrée du doigt par les professionnels du secteur: le maigre budget alloué à la promotion du produit tunisien. Le pays consacre, bon an, mal an, quelque 20 millions d’euros aux actions promotionnelles, contre plus de 100 millions d’euros pour le Maroc. « Les communicateurs marocains mettent sur les seuls marchés français et allemands plus que l’enveloppe totale de notre budget de promotion, tous marchés confondus », se plaint un hôtelier tunisien.
Face à tant de faiblesses, le nouveau ministre du Tourisme, un diplômé du prestigieux Institut d’administration des affaires de Grenoble aura à la fois la tâche de réaliser des objectifs quantitatifs (10 millions de touristes en 2014) et de tirer vers le haut la qualité des services, qui reste le principal talon d’Achille du tourisme tunisien. Une tâche ardue par les temps qui courent. Surtout que tout- ou presque- est à repenser et à refaire dans le secteur. La montée en puissance de certaines autres destinations voisines et les ambitions nourries par d’autres pays, dont la Libye et l’Algérie, n’est pas là pour faciliter les choses.
Nommé récemment ministre du Tourisme, le vétéran de la mise à niveau de l’industrie se trouve face au défi de transposer son modèle dans le tourisme.
A première vue, le tourisme tunisien semble avoir tiré son épingle du jeu en 2009, une « annus horribilis» marquée par une crise économique jamais vue depuis 1929 et à laquelle s’est venue greffée la pandémie de la grippe porcine. La Tunisie a reçu 6,721 millions de touristes (-1,9% par rapport à 2008) et engrangé des recettes de 3,350 milliards de dinars (en hausse de 1,6% sur un an en dinar). Mais comme rien ne vaut que par comparaison, le Maroc qui faisait figure de petit poucet dans le bassin méditerranéen il y a une dizaine d’années a reçu l’an passé 8,35 millions de touristes (+6%) et récolté 52,4 milliards de dirhams de recettes (-5,7%), soit 4, 6 milliards d’euros !
Une lecture plus profonde des chiffres du tourisme tunisien permet également de constater que la Tunisie n’a relativement tiré son épingle du jeu en 2009 que grâce aux touristes libyens et algériens, dont le nombre a atteint 2,7millions (1,8 millions de Libyens et 846 mille d’Algériens), soit 38% des entrées des non-résidents en Tunisie. Or, les professionnels du secteur savent pertinemment que nos voisins maghrébins ne font pratiquement pas tourner les hôtels, les compagnies aériennes et les agences de voyages puisqu’ils privilégient en grande partie la location de maisons comme mode d’hébergement et les déplacements personnels par voie terrestre comme mode de voyages. Les européens (3,9 millions) qui constituaient jusqu’à un temps récent le principal réservoir de touristes pour la Tunisie avec une proportion proche de 80% sont tombées à 59,8%. Autre ombre au tableau: les revenus par nuitée (57 euros) et par touriste (266 euros) enregistrés en Tunisie restent les plus faibles du bassin méditerranéen.
Pourquoi les touristes européens ont-ils fui la Tunisie? Les professionnels pointent, en premier lieu, du doigt une qualité des services qui ne cesse de se détériorer. Cet état de fait a été décrié par de nombreuses instances et médias occidentaux. C’est notamment le cas de la revue allemande Touristik Aktuelle. Cette revue, qui fait autorité chez les professionnels, a épinglé dans une étude publiée en mai 2007 la Tunisie pour la médiocre qualité de ses prestations. Les opérations de contrôle qualité menées depuis quelques années ne semblent pas avoir beaucoup contribué à tirer vers le haut la qualité des prestations. Même le programme de mise à niveau des établissements hôteliers (PMNH) ne suscite pas un engouement particulier auprès des hôteliers. Les projets approuvés par le Comité de Pilotage de ce programme n’a jusqu’ici concerné que 79 unités représentant 41 421 lits pour une capacité globale de 234000 lits répartis sur 840 hôtels.
Côté produits, la monoculture balnéaire et estivale plafonne. Selon une étude de l’agence de notation Fitch Rating, «la Tunisie s’est concentrée Depuis les années 60, exclusivement sur le développement des sites balnéaires. Cette stratégie de croissance a abouti à une surcapacité d’offre peu diversifiée qui rend les hôtels très dépendants des tours-opérateurs internationaux et favorise ainsi le bradage des prix ».
Contrairement à ses concurrents au sud de la Méditerranée, le pays n’ a entrepris la diversification de son produit que depuis quelques années.
Selon Mohamed Belaâjouza, président de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH), l’endettement excessif des hôteliers oblige également plusieurs d’entre eux à offrir des prestations médiocres et à céder facilement aux pressions des tour-opérateurs, ce qui renforce l’image d’une destination à bas prix. Conséquence : la Tunisie draine essentiellement une clientèle européenne appartenant à la classe moyenne, ce qui explique des recettes presque trois fois moins importantes que celles du royaume chérifien.
La destination pâtit également du protectionnisme excessif de son ciel, le boom des lits d’hôtels ne s’est pas accompagné d’une augmentation conséquente des sièges d’avions. Hormis Transavia, filiale d’Air France-KLM, le ciel tunisien reste hermétique aux compagnies low cost. La destination à moins de trois heures de vol des principales capitales européennes compte beaucoup moins de liaisons aériennes avec l’Europe que le Maroc, où opèrent près d’une cinquantaine de compagnies depuis l’entrée en vigueur, en 2006, de l’accord d’Open Sky, avec l’Union européenne.
Autre faiblesse montrée du doigt par les professionnels du secteur: le maigre budget alloué à la promotion du produit tunisien. Le pays consacre, bon an, mal an, quelque 20 millions d’euros aux actions promotionnelles, contre plus de 100 millions d’euros pour le Maroc. « Les communicateurs marocains mettent sur les seuls marchés français et allemands plus que l’enveloppe totale de notre budget de promotion, tous marchés confondus », se plaint un hôtelier tunisien.
Face à tant de faiblesses, le nouveau ministre du Tourisme, un diplômé du prestigieux Institut d’administration des affaires de Grenoble aura à la fois la tâche de réaliser des objectifs quantitatifs (10 millions de touristes en 2014) et de tirer vers le haut la qualité des services, qui reste le principal talon d’Achille du tourisme tunisien. Une tâche ardue par les temps qui courent. Surtout que tout- ou presque- est à repenser et à refaire dans le secteur. La montée en puissance de certaines autres destinations voisines et les ambitions nourries par d’autres pays, dont la Libye et l’Algérie, n’est pas là pour faciliter les choses.