Une perspective qui ne plaît pas aux producteurs et importateurs marocains d’alcools. L’Etat s’apprête à augmenter la taxe intérieure sur la consommation (TIC) des vins, bières et spiritueux. «La hausse serait de 50% pour tous les produits», selon Omar Aouad, secrétaire général de l’Association des producteurs de raisins au Maroc (ASPRAM) et directeur général des Celliers de Meknès. On parle d’un surplus de 200 à 250 DH l’hectolitre pour la bière, 3.500 DH l’hectolitre pour les spiritueux (à base d’alcool pur) 130 DH pour le vin ordinaire et 150 DH le vin fin.

Les professionnels confirment qu’une augmentation des prix s’ensuivra si la décision est prise. «Les producteurs et importateurs ne peuvent pas tenir sans répercuter l’augmentation sur leurs prix de vente au public», explique-t-on au niveau de l’association. Le vin ordinaire est taxé à 365 DH l’hectolitre (260 au titre de la TIC, 100 DH pour la TVA spécifique et 5 DH au profit de la Croix-Rouge). Le vin fin, lui, supporte 405 DH de taxes (300 DH de TIC, 100 DH de TVA spécifique et 5 DH pour la Croix-Rouge). La TIC sur la bière atteint 550 DH l’hectolitre. Pour les spiritueux (whisky vodka…), la bouteille de 75 cl supporte une TIC de 21 DH. Pour les spiritueux, les droits de douane ont été totalement abandonnés sur les 4 dernières années de démantèlement. La bière importée, elle, supporte encore 38% de droits de douane. La baisse progressive de ces droits ramènera le taux à 10% en 2010.

Pour certains professionnels, ce serait cette baisse continuelle des droits de douane inscrite dans l’accord avec l’Union européenne, qui pousse l’Etat à se rattraper sur la TIC. Dans le milieu des affaires, il se dit que ces recettes supplémentaires seraient destinées au financement de l’INDH.
Des producteurs jugent que «les pouvoirs publics adoptent une démarche bizarre, en encourageant d’un côté les investisseurs à replanter les vignobles dans le cadre des concessions de la Sogeta-Sodea et en augmentant fortement de l’autre les taxes». L’Aspram craint que tout ce qui a été fait jusque-là au niveau du secteur (dynamisme à l’export, développement de marques…) ne soit compromis par la lourdeur de la fiscalité. Aouad affirme que «50% du chiffre d’affaires d’un producteur de vins est versé sous forme de taxes».
Les arguments de l’Aspram n’ont pas trait au tourisme, mais évoquent la crise sociale des régions productrices en cas de baisse de régime des ventes. L’association craint surtout que la contrebande et les distilleries informelles ne profitent de la conjoncture pour se développer davantage. Aouad note dans ce sens «l’absence de plan de lutte contre ces productions, qui ont parfois pignon sur rue sans que personne ne s’en inquiète». Les autorités mènent des campagnes ponctuelles, mais les affaires reprennent de plus belle dès le relâchement des contrôles.

L’actuelle hausse des taxes envisagées n’est pas sans rappeler une certaine année 1979, lorsque la consommation a chuté de moitié en une année, notamment en raison du relèvement de la TIC. Le secteur a enregistré une baisse de la consommation de 500.000 à 250.000 hectolitres en 1980. «Depuis le temps, la consommation ne s’est développée que de 50.000 hectolitres de plus pour atteindre aujourd’hui 300.000 hectolitres annuellement», selon Omar Aouad, secrétaire général de l’Aspram et DG des Celliers de Meknès. Il souligne que «la nouvelle mesure sera encore une fois extrêmement improductive au niveau du secteur, qui est actuellement investi dans des projets de modernisation et de développement de son outil productif».