Avec près de 1 200 points de ventes, AS Voyages – fusion des réseaux volontaires AFAT et Selectour - se présente comme le premier réseau d'agences de voyages en France. En 2010, première année de cette fusion anoncée fin 2009, AS Voyages a réalisé un volume d'affaires global de 2 550 millions d'euros dont 1 025 en aérien. Rencontre avec François-Xavier de Bouärd, co-président d'un réseau qui se dit en bon état de marche.
François-Xavier de Bouärd : "Je trouve la méthode particulièrement surprenante dans cette période difficile pour l'ensemble des acteurs du tourisme. Imaginez que tous les réseaux de distribution en fassent autant !
Elle est d'autant plus surprenante de la part d'un groupe dont le président Denis Wathier s'est lancé dans un projet de fédération, afin de représenter et défendre les professionnels du tourisme auprès des pouvoirs publics. Ce n'est pas très encourageant pour la suite du processus.
Le courrier adressé la semaine dernière par Thomas Cook France à ses fournisseurs vient en contradiction des propos tenus par Denis Wathier lors d'une mémorable réunion organisée à Bercy et préparée de longue date par le SNAV.
Devant le Secrétaire d'Etat au Tourisme Frédéric Lefèbvre, devant Georges Colson président du SNAV et René-Marc Chikli président du CETO n'avait-il pas eu un discours très positif sur son groupe, arguant qu'il n'avait besoin d'aucune aide, que tout allait bien pour la filiale française du groupe Thomas Cook ? Son discours était alors en totale opposition avec celui de Georges Colson, qui faisait valoir les difficultés du moment.
Il serait intéressant d'avoir à ce sujet la position du président du CETO qui représente les tour-opérateurs et qui est aussi l'initiateur de cette future fédération."
F-X.B. : "Beaucoup annonçaient une saison catastrophique en raison de pénuries probables de produits. Cette possibilité, nous l'avions largement anticipée avec nos partenaires tour-opérateurs ainsi qu'avec les centrales hôtelières classiques qui sont venues compléter l'offre. Nous avons aussi travaillé avec un nouvel entrant, Travelplan, bien placé sur l'Espagne et les pays hispaniques.
A fin juillet les ventes du réseau étaient en progression par rapport à 2010 et surtout par rapport à ce que nous pouvions en effet redouter. Nous étions aidés en cela par un excellent début d'année en dépit des problèmes. 2011 aurait pu être une très belle année... Disons aussi que le facteur météo a boosté les ventes de juillet en accentuant fortement les forfaits « familles » de dernière minute."
Nous n'avons pas à nous plaindre.
TourMaG.com - Quelles sont vos perspectives pour l'arrière-saison ?
F-X.B. : "Septembre devrait être assez bon. Les consommateurs changent de comportement. Ils voyagent de plus en plus en moyenne et basse saison, évitant ainsi les prix exorbitants de haute saison.
Les nouveaux seniors, plus actifs, voyagent plus longtemps. En partenariat avec nos fournisseurs nous allons d'ailleurs sortir pour Top Resa une nouvelle brochure labellisée Afat et Selectour dédiée aux Longs séjours. Elle s'ajoutera aux circuits Asie, au Bien-Etre, aux week-ends et courts séjours. Je reste optimiste mais il faut maintenant rassurer le marché."
F-X. de B. : "Tout en tenant compte de la montée en puissance des ventes en ligne, l'utilité de l'agence physique de proximité est de plus en plus avérée. Quant à nos marques Afat et Selectour, elles ont un rôle déterminant. Elles sont la signature d'un accueil, d'un service, d'un bon conseil. J''ai toujours dit que l'agence de proximité a de beaux jours devant elle.
Je rappelle par ailleurs que nous avons été les premiers à développer un process multicanal mis au service des clients et des agences. Notre partenariat avec Lastminute, nos ventes flash adressées à nos prospects et aux clients de nos fichiers CRM, toutes ces stratégies voulues par le Conseil d'Administration créent du trafic dans les agences.
En matière de multicanal nous avons aujourd'hui une longueur d'avance intéressante par les temps qui courent."
TourMaG.com - Quelle est la part de production réalisée par les agences du réseau AS et à quand une production « maison » ?
F-X.de B. : "Je le répète souvent, la production n'est pas dans notre stratégie et au vu des difficultés que traversent les tour-opérateurs qui s'engagent, notamment dans l'aérien, je préfère être à ma place.
Soyons objectifs, l'essentiel de notre trafic tourisme se traduit par des forfaits. La Tunisie, le Maroc, la Grèce, les Baléares etc. sont des produits basiques. Nous avons surtout besoin de volumes et de stocks. Je vois mal nos réceptifs étrangers mettre en place des vols au départ des régions !
Nous avons de bons partenariats notamment avec les fournisseurs du Top 14 qui représentent maintenant 58 % de nos ventes... une réponse à ceux qui avaient des doutes sur notre capacité à concentrer nos ventes.
Afat comme Selectour avaient depuis longtemps des réceptifs étrangers référencés. Nous les avons mis en commun et le réseau les utilise en fonction de ses besoins.
Le sur mesure est demandé de façon ponctuelle ou sur certains circuits, de préférence en hiver. Nous avons des partenaires TO organisés pour réaliser des voyages sur mesure."
F-X.B. : "Un tel rapprochement n'est pas du tout à l'ordre du jour. Fram fait partie de nos cinq premiers partenaires et nous sommes satisfaits du partenariat initié avec lui début 2010. Fram a intégré une partie des agences indépendantes labellisées « Ambassade » dans le réseau. Cela représente près de 80 points de ventes."
TourMaG.com - Avez-vous eu, depuis le début de l'année, des défaillances à déplorer dans le réseau ?
F-X.B. : "Nous avons eu des départs à la retraite, des fermetures volontaires, des cessions mais nous n'avons pas eu de dépôt de bilan. Nous avons en revanche de nouvelles adhésions. Il ne se passe pas un conseil d'administration sans nouvelles demandes. Nous appréhendons toutefois la rentrée de septembre. Le point de rencontre entre deux saisonnalités est toujours une période difficile pour la trésorerie des agences de voyages."
F-X.B. : "Afat et Selectour avaient, de façon historique, des modèles économiques différents. En fusionnant nous nous sommes appuyés sur un juste retour en fonction des efforts, sur une notion plus forte du mérite dans la répartition de la richesse.
Notre objectif est de distribuer la richesse de la manière la plus équitable possible, en donnant sa chance à tous et pas forcément aux plus gros. Nous n'avons mis personne à l'index. L'enveloppe globale est la même. Au final, chacun s'y retrouvera à commencer par ceux qui jouent le jeu du Top 14.
C'est un peu le mal français, nous avons en horreur la culture du changement.
Nous nous sommes mal compris et nous avons sans doute pêché en matière de communication interne."
TourMaG.com - Comment se passe la cohabitation entre les agences Afat et Sélectour, deux réseaux qui furent longtemps concurrents ?
F-X.B. : "Comme tout jeune couple qui apprend à vivre ensemble, nous avons eu des petites zones de turbulences. Aujourd'hui, à entendre nos partenaires, à travers nos forces de ventes et nos réunions, on ne voit plus de différence sur le terrain. Le principe est acquis.
Nous n'avons pas perdu de temps. Nous avons fait tout ce que nous avions annoncé en novembre 2009 lors de notre congrès de Séville. Nous avons harmonisé nos sites internet et intranet, et organisé nos deux sièges tout en respectant le calendrier."
F-X.B. : "Afin de faciliter cette intégration nous avons annoncé dès le départ que nous fonctionnerions pendant trois ans en binôme avec deux co-présidents, neuf représentants Afat et autant de Selectour à siéger au conseil d’administration. Il en est de même pour les délégués régionaux, le même nombre pour chacun des réseaux. Mais cette co-présidence n'est pas inscrite dans le marbre. Elle est destinée à évoluer."
TourMaG.com - Votre congrès annuel approche. Quel est le nombre de participants attendus et quel en sera le fil rouge.
F-X.B. : "Les inscriptions ont été envoyées fin juillet. Nous tablons sur au moins 800 participants. Nous avons lancé un prix très attractif, à partir de 250 euros, afin de permettre au plus grand nombre de participer à cet important congrès annuel. Le thème en sera « Agir, Créer et Innover »."
TourMaG.com - Vous ne vous êtes pas encore prononcé sur la fusion Nouvelles Frontières – Marmara au sein du groupe TUI.
F-X.B. : "Elle était inévitable en terme de synergie. Elle aurait dû être faite plus tôt. Pour que les choses évoluent de façon efficace et pour atteindre des objectifs une simple alliance ne suffit pas. Il faut une fusion. Les réseaux volontaires Afat et Sélectour, à leur niveau, en ont fait l'expérience. Et c'est bien pour l'avoir vécu que je suis resté discret. J'attends avant de faire des commentaires la mise en place de l'organisation interne et la future stratégie.
Je m'associe néanmoins aux commentaires de mes confrères des réseaux volontaires que vous avez interrogés. Cette fusion ne change rien dans nos accords de partenariat avec Marmara, qui est un fournisseur important, ainsi qu'avec Tourinter."
F-X. B. : "Je déplore que certains prennent des décisions engageant la vie professionnelle sans communiquer sur leur motivation première. Souvent cette motivation découle de dirigeants ou d'actionnaires de groupes internationaux qui ont leurs sièges hors de France.
Ces initiatives viennent de dirigeants salariés. Elles ne sont pas l'émanation de véritables entrepreneurs. Quelle est la fiabilité de tels projets ?
L'UDIV dit fédérer les réseaux industriels, intégrés ou dépendant de la grande distribution. A quelles fins ? Je ne vois pas où sont les différences entre un client d'une agence de voyages d'un réseau « intégré » et celui d'une agence indépendante adhérant à un réseau. Quant aux salariés, ils ont les mêmes besoins en terme de rétributions, de formations...
Au SNAV, les responsables des commissions techniques qui mènent les négociations sont détachés par les réseaux intégrés à l'instar de la présidente de la Commission Juridique qui est directrice juridique au sein du groupe TUI France... "
F-X.B. : "Notre plus gros problème est de préserver nos parts de marchés et de faire rentrer nos clients dans nos agences. Cette Fédération apporte-t-elle une réponse ? Nous voyons bien l'intérêt de Thomas Cook qui tend à affaiblir la distribution pour renforcer sa propre structure. En revanche je n'ai toujours pas compris les arguments qui ont poussé des réseaux tels que Carrefour et Leclerc à adhérer à l'UDIV.
En fusionnant avec l'aérien, qui ira négocier en matière de charges salariales, de formations etc.
Les métiers sont différents...
Heureusement le positif ressort lors des crises importantes à l'instar de celle provoquée en 2010 par le nuage volcanique. Les aériens, les tour-opérateurs et le SNAV ont su avoir la bonne attitude avec les consommateurs."
source: TourMag