Entretien avec Dora Milad, Présidente de la FTH -Hospitality , Innovations & l'Afrique de demain

Tourismag : Le monde de l’hospitality traverse une période de transformation profonde, portée par de nouvelles attentes des voyageurs, des mutations technologiques et des enjeux de durabilité.  Quels sont aujourd’hui les grands bouleversements qui redéfinissent les fondations mêmes de l’hospitality ?

Dora Miled : L’hospitality traverse effectivement une transformation profonde, mais il est fondamental de rappeler que ses fondements restent immuables. L’hospitalité, au cœur, c’est la capacité à satisfaire pleinement le client, en comprenant ses attentes, ses émotions et en créant des moments uniques. Cependant, il est plus que naturel que les modalités d’expression de cette hospitalité évoluent.

En effet, le paradigme de l’expérience client a évolué. Dans les années 80 - 90, l’expérience touristique était souvent centrée sur la consommation de sites emblématiques et d’activités standardisées. Le voyageur cherchait avant tout à « découvrir » physiquement une destination, misant sur la quantité (nombre de monuments visités, plages fréquentées, nombre de plats locaux dégustés). Aujourd’hui, le touriste moderne privilégie une expérience immersive, authentique et personnalisée, avec un fort désir d’engagement culturel, de connexion émotionnelle et de transformation personnelle.

L’hospitalité, a toujours été et demeure avant tout une affaire d’humain. Le cœur de l’hospitality reste le client à qui on offre une expérience mémorable et personnalisée. »

Par ailleurs, sur le volet durabilité, depuis toujours, la responsabilité environnementale s’inscrit au cœur de nos pratiques hôtelières. Un gestionnaire avisé optimise systématiquement ses coûts, en réduisant la consommation des ressources naturelles et la production de déchets. Aujourd’hui, cette démarche s’impose comme un levier différenciant puissant, pleinement valorisé dans les stratégies marketing et commerciales. Ainsi, elle devient un véritable argument clé à intégrer dans toute communication destinée à renforcer l’attractivité et la crédibilité des acteurs engagés.

En outre, les mutations technologiques et la transformation des attentes des nouvelles générations, tant parmi les employés que les clients, impose une adaptation rapide.In fine, l’hospitalité a toujours été et demeure avant tout une affaire d’humain. Le cœur de l’hospitality reste le client à qui on offre une expérience mémorable et personnalisée.

Tendances & ruptures

TMG - L'hospitality n'est plus seulement un service, mais une expérience totale. Quelles tendances vous semblent vraiment structurantes et disruptives aujourd’hui, celles qui vont redéfinir la manière de voyager et de consommer l'hospitalité dans les 10 prochaines années ?

D.M. Pour vous répondre, je m’appuierai sur les analyses approfondies et les benchmarks stratégiques élaborés par des cabinets de conseil de renommée internationale pour nourrir une réflexion éclairée et rigoureusement étayée. En effet, le bien-être, matériel et immatériel, prend une place centrale. Bain et Deloitte soulignent que les séjours bien-être, incluant spas, offres holistiques, et voyages centrés sur la santé mentale, explosent. À cela s’ajoutent des expériences immersives basées sur la réalité augmentée, la réalité virtuelle, et la « gamification », qui transforment le voyage en une aventure sensorielle et émotionnelle unique.

70% des voyageurs mondiaux considèrent désormais la durabilité comme un critère décisif dans le choix de leur hébergement.

Enfin, des études, notamment de Booking.com, indiquent que 70% des voyageurs mondiaux considèrent désormais la durabilité comme un critère décisif dans le choix de leur hébergement. L’hôtellerie adopte ainsi une approche globale écoresponsable, allant de la gestion des déchets aux usages énergétiques durables, en passant par des certifications environnementales. Cette tendance devient un levier commercial fort, à la fois pour attirer une clientèle consciente et pour maîtriser les coûts opérationnels. En résumé, l’évolution convergerait autour de trois leviers stratégiques : l’expansion des expériences bien-être et immersives, catalyseurs d’engagement émotionnel ; la digitalisation accélérée, vecteur d’efficience opérationnelle et de sécurité renforcée ; et l’intégration systémique de la durabilité, pilier différenciant et créateur de valeur.

TMG - L'intelligence artificielle, le digital, l'automatisation : jusqu'où peuvent-ils transformer l'hôtellerie sans perdre l'essence de l'accueil humain ?

Effectivement, la digitalisation massive influence le tourisme. Sur le volet client, la planification, le partage en temps réel, la recherche d’avis via les réseaux sociaux ont redéfini l’expérience touristique. Le « storytelling » personnel sur Instagram ou TikTok, la réalité augmentée sur site, ou encore les applications mobiles participent à une expérience augmentée et ultra-connectée, bien éloignée du voyage « déconnecté » que nous avons connu auparavant.

Sur le volet interne, l’automatisation permet d’optimiser l’opérationnel notamment les tâches administratives (planning, paie, gestion des congés). Elle améliore la communication interne et contribue ainsi à renforcer la productivité, la satisfaction des équipes et la compétitivité de l’établissement.

L’intelligence artificielle doit être perçue comme un accélérateur permettant de libérer du temps au personnel afin de se concentrer sur ce qui importe vraiment : le lien humain et la qualité de service. »

De nos jours, l’IA vient consolider la digitalisation et l’automatisation. Selon des études portées par McKinsey et Revfine, la croissance annuelle prévue de l’IA en hôtellerie dépasserait les 60% d’ici 2033. L’IA permettra d’assurer une expérience client hyper personnalisée, de l’enregistrement automatisé au pilotage intelligent des chambres (lumière, température, services adaptés), jusqu’aux recommandations personnalisées en temps réel, ce qui favorise la fidélisation et améliore significativement l’expérience client.
Stratégiquement, il faudrait percevoir l’intelligence artificielle, l’automatisation de tâches répétitives, la personnalisation extrême via l’analyse de données, en tant qu’accélérateur permettant de libérer du temps au personnel et ce, afin de se concentrer sur ce qui importe vraiment : le lien humain et la qualité de service.
 

Focus consommateur

TMG  Le client d'aujourd'hui n'achète plus seulement une chambre, mais une expérience émotionnelle. Comment les hôteliers tunisiens et africains peuvent-ils répondre à ce besoin de personnalisation, sens et authenticité ?

D.M. Les émotions sont souvent la résultante d’une expérience sensorielle. Il serait donc fort opportun que l’Afrique, et notamment la Tunisie, placent leur capital sensoriel incommensurable, en tant que levier stratégique différenciant de premier ordre dans la quête d’une expérience client émotionnelle premium.

l’excellence opérationnelle représente une opportunité majeure de création de valeur

En orchestrant une immersion multisensorielle cohérente—où l’olfactif, à l’instar du jasmin en Tunisie, dialogue avec un univers visuel contemporain et raffiné (uniformes intégrant des codes traditionnels), une ambiance sonore régionale subtilement orchestrée, et une palette gustative et tactile ancrée au terroir. Ainsi, les établissements hôteliers pourraient non seulement activer l'attachement émotionnel profond de leurs clients, mais également répondre aux attentes d’un tourisme international en quête d’authenticité et de sens. En somme, cette stratégie au carrefour de l’authenticité culturelle et de l’excellence opérationnelle représente une opportunité majeure de création de valeur et de différenciation sectorielle pour les hôtels africains, en phase avec les aspirations émotionnelles et expérientcelles des nouvelles générations de voyageurs.

TMG Voyez-vous émerger un nouveau profil de consommateur post-Covid et post-crises, plus conscient, plus sélectif, plus exigeant ?

D.M. En effet, la pandémie a accéléré l’adoption des technologies « sans contact » dans les hôtels, comme le check-in/out via mobile, les paiements dématérialisés, etc. Ces technologies assurent sécurité, fluidité, et efficience, tout en réduisant les coûts de main- d’œuvre.

Le consommateur post-crises s’impose par une vigilance accrue, combinant exigences d’authenticité, de personnalisation et d’engagement durable. »

De plus, avec la montée du télétravail, les hôtels se réinventent comme espaces hybrides combinant hébergement et lieux de travail adaptés, attirant une génération croissante de nomades numériques. Selon KPMG, ces espaces offrent flexibilité, connectivité renforcée et services personnalisés pour une clientèle d’affaires élargie. Selon Deloitte, l’hôtellerie hybride attire 40% de plus de nomades digitaux en 2025, témoignant d’une nouvelle dynamique de consommation. En outre, le consommateur post-crises s’impose par une vigilance accrue, combinant exigences d’authenticité, de personnalisation et d’engagement durable. McKinsey souligne que 68% des clients intègrent désormais la responsabilité sociétale dans leur choix hôtelier.

La sécurité sanitaire reste un enjeu majeur avec 73% des voyageurs privilégiant des établissements transparents et flexibles sur les politiques de réservation (KPMG, 2025). Finalement, pour capter ce consommateur plus exigeant et sélectif, les établissements doivent conjuguer agilité opérationnelle, engagement ESG et excellence relationnelle afin d’assurer leur compétitivité pérenne dans un environnement incertain. Cette vision intégrée est désormais la clé pour répondre aux nouvelles attentes et bâtir un avantage différenciant durable

Durabilité & innovations

TMG Les géants mondiaux de l'hospitality mettent en avant des programmes de durabilité très ambitieux. Pensez-vous que ce soit une réalité sincère ou une communication de façade ?

D.M. Les acteurs mondiaux ont transcendé la simple communication pour ancrer la durabilité dans leurs stratégies de création de valeur à long terme. Marriott International se dote d’une roadmap ambitieuse 2025, visant à réduire de 15% sa consommation d’eau, de 30% ses émissions carbone et de 45% ses déchets en décharge, impactant plus de 6 500 établissements. Ces ambitions se traduisent en résultatsmesurables : économies annuelles équivalentes à plus de 3 milliards de litres d’eau et 21 500 tonnes métriques de CO2 évitées, attestant d’une efficience opérationnelle maximisée et d’une intégration ESG profonde (Marriott Serve 360, 2025).

Derrière l’évidence d’une communication soignée, les faits démontrent une véritable transformation structurelle et un engagement profond. »

Hilton déploie la stratégie « Voyager avec un but », dont les insights consommateurs révèlent que 44% des moins de 25 ans privilégient aujourd’hui les établissements démontrant un engagement social et environnemental. Cette dynamique catalyse des investissements ciblés dans l’écoresponsabilité, faisant de la durabilité un levier clé de différenciation et de fidélisation à l’ère du consommateur conscient. Accor, quant à lui, opère une transformation holistique en intégrant des critères ESG au cœur de sa gouvernance et de ses dispositifs d’investissement, tout en engageant des collaborations stratégiques avec des partenaires majeurs tels qu’AXA. Cette démarche dépasse la posture marketing pour s’incarner dans des initiatives d’innovation continue : optimisation des déchets, élimination des plastiques à usage unique, et évaluation rigoureuse des risques environnementaux, confirmant une maturité durable et un alignement avec les attentes croissantes des stakeholders. Concrètement, les chaînes internationales opèrent sur les 3 volets de durabilité d’un «tourisme qui tient pleinement compte de ses impacts économiques, sociaux et environnementaux actuels et futurs, en répondant aux besoins des visiteurs, des professionnels, de l’environnement et des communautés d’accueil » tel que le définit l’Organisation Mondiale du Tourisme. Ainsi, derrière l’évidence d’une communication soignée, les faits démontrent une véritable transformation structurelle et un engagement profond, positionnant ces leaders comme des accélérateurs de la transition vers une hospitalité durable et performante En somme, l’objectif est de viser l'équilibre entre les trois piliers du développement durable dans la production et la réalisation d'activités touristiques à savoir l’environnement, le social et l’économie.


Dora Miled - Présidente de la FTH

TMG Quels leviers concrets peuvent être actionnés en Afrique, avec moins de moyens mais peut-être plus de créativité et d'agilité ?

 À l’échelle du continent africain, le passage au tourisme durable ne se conçoit plus comme une option mais s’imposedésormais comme un impératif stratégique incontournable. »

Au Kenya, le gouvernement impose des critères d’éco-certification pour les établissements touristiques. En Mauritanie, une loi-cadre sur l’environnement (N° 2000-045) et un décret réglementent l’obligation d’Études d’Impact Environnemental (EIE) pour les projets de construction et d’extension hôtelière, avec des mécanismes de contrôle et de conformité stricts pour réduire l’impact environnemental. Au Maroc, la loi 52-21 sur la Transition Énergétique et le décret 3.25-487 sur la Gestion desDéchets Hôteliers imposent aux hôtels de plus de 50 chambres des objectifs précis de réduction de consommation énergétique, d’utilisation d’énergies renouvelables, de publication d’un bilan carbone annuel et de tri/recyclage des déchets, avec sanctions financières et exclusions de subventions en cas de non-respect. Concrètement, à l’échelle du continent africain, le passage au tourisme durable ne se conçoit plus comme une option mais s’impose désormais comme un impératif stratégique incontournable, voir une obligation légale.

FITA 2025 - Panel Ministériel - 7 ministre du topurisme africains et Bally Mossadek

 

Afrique : visions et défis

TMG  En mai dernier, pour la première fois, huit ministres africains du tourisme se sont réunis pour débattre de l'avenir du continent. Ils ont notamment proposé de standardiser et homogénéiser l'offre africaine. Est-ce, selon vous, une voie d'avenir ou au contraire un risque d'effacer la diversité et l'identité propre de chaque pays ?

D.M. Globalement, la vision pour l’Afrique à l’horizon 2040 envisage une transformation majeure du paradigme démographique en faveur du continent, grâce à son rajeunissement accéléré de la population. Cependant, le ratio personnes en âge de travailler/personnes à charge est actuellement faible (environ 1,3 pour 1), limitant l’effet positif de la démographie sur la croissance économique, avec une amélioration prévue seulement vers 2050, lorsque ce ratio pourrait atteindre 1,7, déclenchant un dividende démographique (selon BCG). Ce "dividende" est comparable à un bénéfice financier provenant de ce changement démographique. Toutefois, ce dividende démographique représente aussi un défi, notamment en matière de création d’emplois suffisants pour la population active. De plus, l'Afrique s'oriente clairement vers une diversification économique pour réduire sa dépendance historique aux revenus provenant de l'extraction minière et accroître les contributions des services, notamment le tourisme. Cette diversification vise à aplatir l'histogramme des revenus, équilibrant les sources économiques pour plus de résilience et de développement durable.

Le succès réside dans la capacité à articuler une vision intégrée où

la standardisation ne devient pas uniformisation, mais au contraire un levier de valorisation des singularités territoriales et culturelles. » Il est donc naturel d’adopter une réponse collective face à des défis universels : la force d’un continent uni et la proposition portée par huit ministres lors de leur réunion en mai, doit donc être saisie comme une opportunité stratégique. Cette démarche se veut un cadre fédérateur, un socle commun de qualité, de durabilité et de promotion, qui facilite la mutualisation des ressources, l’accès aux marchés internationaux et l’optimisation des investissements. Cependant, la véritable valeur du tourisme africain réside précisément dans sa diversité prodigieuse, qui doit être préservée et mise en lumière. Le succès réside dans la capacité à articuler une vision intégrée où la standardisation ne devient pas uniformisation, mais au contraire un levier de valorisation des singularités territoriales et culturelles. Dans cette perspective, l’enjeu est double : créer un référentiel partagé qui élève le niveau qualitatif et durable de toute la chaîne de valeur touristique africaine, tout en maintenant une granularité forte entre les offres, les expériences et les identités. Cette approche duale, quicombine cohérence stratégique et respect identitaire, permet de faire du tourisme africain un moteur d’inclusion sociale, de développement économique et de valorisation patrimoniale.

Ecodome au sud de la Tunisie

TMG Quelle serait votre vision personnelle pour bâtir une hospitality africaine forte, compétitive et reconnue à l'échelle mondiale ?

Le tourisme en Afrique peut devenir un véritable levier différenciant, unifiant les forces du continent sans sacrifier ses richesses plurielles. »

Face aux enjeux contemporains et aux ressources parfois limitées du continent, l’Afrique dispose néanmoins d’un véritable capital d’agilité et de créativité pour impulser un tourisme durable à haute valeur ajoutée en s’appuyant sur plusieurs leviers stratégiques émergents. En effet, l’activation du tourisme communautaire s’impose comme un catalyseur de développement inclusif et résilient. La mise en place d’écosystèmes d’innovation territoriale, à travers l’assemblage des circuits éco-thématiques (écotourisme, tourisme culturel, gastronomie durable), invite à une revalorisation forte des richesses naturelles et culturelles dans une perspective bas-carbone. La montée en puissance d’une gouvernance multi- acteurs agile, fondée sur des partenariats entre collectivités, secteur privé, ONG et communautés locales, devient la pierre angulaire pour garantir cohérence, transparence et efficacité. Ainsi, c’est à travers une gouvernance innovante, multi-acteurs et décentralisée que le tourisme en Afrique peut devenir un véritable levier différenciant, unifiant les forces du continent sans sacrifier ses richesses plurielles. Cette articulation agile est la clé pour concrétiser le potentiel du tourisme africain, en phase avec les attentes des consommateurs modernes et les impératifs du développement durable.

Au croisement de ces leviers, l’Afrique dessinerait un modèle différenciant et positionnant le continent comme un modèle unique, compétitif à l’échelle internationale.

Tunisie en perspective

TMG Si la Tunisie devait devenir un véritable laboratoire de l’hospitality africaine, quelles innovations et quels modèles seriez-vous prête à expérimenter ? Et dans cette perspective, quelle place donneriez-vous à l’éducation et à la formation des talents, qui sont souvent le vrai moteur de transformation et de différenciation dans notre secteur ?

 Si la Tunisie aspire à incarner un laboratoire d’innovation pour l’hospitality africaine, elle doit se positionner résolument en hub avant-gardiste d’un tourisme régénératif. »Dans les années 80 et même 90, la Tunisie était effectivement reconnue comme un modèle phare en Afrique, tant au niveau de la formation professionnelle dans l’hôtellerie que dans l’élaboration de lois et normes sectorielles.

Dans ce contexte, la formation était au centre des préoccupations, la Tunisie développant des centres et écoles spécialisés, attirant des professionnels africains désireux d’acquérir un savoir-faire reconnu internationalement. Sur le plan réglementaire, la Tunisie a instauré un cadre normatif en avance par rapport à la région, avec des classifications d’hôtels, des contrôles qualité, et des politiques incitatives qui ont servi de référence en Afrique, contribuant à une forte professionnalisation du secteur. Ainsi, historiquement, la Tunisie a joué un rôle dual de centre d’excellence en formation hôtelière et de précurseur des normes sectorielles en Afrique, Si la Tunisie aspire à nourrir sa réputation comme un hub de référence, à incarner un laboratoire d’innovation pour l’hospitality africaine, elle doit se positionner résolument en hub avant-gardiste d’un tourisme régénératif, où convergence technologique, responsabilité environnementale et impact sociétal créent une nouvelle matrice de valeur durable et différenciante.

Chaque expérience touristique deviendra un levier de contribution positive et une signature d’excellence territoriale, faisant de la destination une vitrine continentale et un catalyseur d’innovations sectorielles

Premièrement, au cœur de cette vision, la Tunisie impulsera des projets pilotes de tourisme régénératif, intégrant restauration écologique active, engagement communautaire profond et valorisation des patrimoines immatériels. Chaque expérience touristique deviendra un levier de contribution positive et une signature d’excellence territoriale, faisant de la destination une vitrine continentale et un catalyseur d’innovations sectorielles Secundo, l’expérimentation structurée autour de synergies entre établissements hôteliers et start-ups tech/sociales disruptives favorisera un écosystème d’innovation ouverte, catalysant la co-création de solutions avancées. D’ailleurs, dans ce sens, la FTH ne se repose pas sur ses lauriers. En effet, dans le cadre du projet pilote TIOP (Tourism Innovation Oriented Partnership), financé par la GIZ, nous avons amorcé et donné le cap d’une collaboration active entre des hôtels et des startups tunisiennes. Concrètement, les success-stories illustrent cette dynamique vertueuse. Nous avons concrètement soutenu des business models qui focalisent sur l’enrichissement de l’expérience client, l’efficacité opérationnelle et aussi le développement durable.

Cette triple dynamique, Régénération territoriale, innovation collaborative, et excellence humaine – positionnera la Tunisie comme un modèle de référence incontournable, exemplaire dans la transition vers une hospitalité africaine durable, inclusive et à forte valeur ajoutée.

Tertio, la transformation ne saurait se passer d’un capital humain expert et passionné, et au sein de la FTH, l’UAFE (Unité d’Appui à la Formation et à l’Employabilité), préparera une génération de talents capable de piloter ces nouveaux paradigmes, garantissant ainsi la pérennité, la différenciation et la montée en puissance durable du savoir-faire tunisien dans l’hospitality.

Cette triple dynamique – régénération territoriale, innovation collaborative, et excellence humaine – positionnera la Tunisie comme un modèle de référence incontournable,exemplaire dans la transition vers une hospitalité africaine durable, inclusive et à forte valeur ajoutée.


TMG - Où voyez-vous les grands défis stratégiques pour repositionner la Tunisie sur le marché international, au-delà du balnéaire classique ?

D.M. Au risque de vous surprendre, selon WiseGuy Reports, en décembre 2024, des études confirment la prédominance du tourisme balnéaire à l’échelle mondiale. En effet, on parle bel et bien de l’acteur majeur, évalué à 60 milliards USD en 2024, avec une croissance attendue pour atteindre environ 100 milliards USD d’ici 2032, et des projections robustes à la hausse pour la décennie suivante.

La compétitivité durable, c’est la simplicité bien exécutée : standards clairs, preuves mesurées et talents formés. »

Ce secteur attire de grands volumes de visiteurs cherchant soleil, sable et activités récréatives en bord de mer, ce qui en fait une tendance prépondérante et inéluctable dans le secteur mondial du tourisme. La croissance est portée par la demande massive des voyageurs en quête de détente, d’aventure et d’expériences uniques au bord de la mer, renforcée par un intérêt croissant pour le tourisme durable dans les zones côtières Cette tendance est consolidée dans différentes sources fiables et non-propagandistes. En effet, le rapport Euromonitor via Regiondo (2025) signale que plus d’un tiers des touristes (36%) souhaitent passer leurs vacances près d’un point d’eau, ce qui inclut plages, côtes, lacs et rivières, confirmant la forte demande pour le tourisme balnéaire à l’échelle mondiale.

L’Organisation Mondiale du Tourisme (ONU Tourisme) souligne aussi la reprise post- pandémique avec 1,3 milliard d’arrivées internationales en 2023, en grande partie portée par des destinations balnéaires populaires, dont la demande continue à croître en 2025, soutenant la place centrale du tourisme balnéaire.

D’ailleurs, l'Égypte vient de signer un accord de 18 milliards $ avec Emaar Misr et City Stars Group pour créer Marassi Red Sea, un méga-resort situé près de Hurghada ; 12 hôtels, marina, chalets de type Maldives, écoles, hôpitaux, commerces et restaurants. A mon humble avis, il serait fort opportun, voir impératif, de recentrer nos efforts stratégiques sur notre core-business (Cash Cow), avant de diluer nos ressources et notre attention vers des initiatives secondaires (Stars ou Question Marks) plus ambitieuses mais encore non consolidées car tributaires de l’open-sky.

 

TMG Si vous deviez transmettre un message aux hôteliers et décideurs africains aujourd'hui, en une phrase, ce serait lequel ?

La compétitivité durable, c’est la simplicité bien exécutée : standards clairs, preuves mesurées et talents formés. 

 

TMG  Et à la génération future de professionnels de l'hospitality en Tunisie : quelle vision voulez-vous leur léguer ?

Apprenez en continu, respectez le client et le territoire, osez entreprendre : votre singularité est une force. »